Le chef de l'Eglise polonaise dans la tourmente

Le chef de l'Eglise polonaise doit essuyer un torrent de critiques pour avoir suggéré il y a peu que les enfants abusés au sein de l'Eglise avaient une part de responsabilité dans leur sort. Interrogé un peu plus tôt ce mois-ci sur les récents scandales de pédophilie qui ont secoué l'Eglise de son pays, Mgr Jozef Michalik, a déclaré aux journalistes que les enfants issus de familles en difficulté « cherchaient à se rapprocher des autres, pouvaient se perdre et perdre les autres en même temps ». Ces quelques mots ont suffi à susciter la polémique et le prélat a dû s'excuser le jour même et déclarer qu'il avait été mal compris. Il n'avait jamais voulu, a-t-il martelé, suggérer que les enfants agressés sexuellement en étaient responsables.

Mais le mal était fait. Son commentaire a déclenché un débat dans les médias polonais, qui ont rappelé que le chef de l'épiscopat national avait apporté son soutien à un prêtre convaincu d'abus sexuels sur mineurs en 2004. L'une de ses victimes, Ewa Orlowska, s'est dite horrifiée par les propos de Mgr Michalik qui lui ont fait éprouver, dit-elle, « peur et dégoût ». Face à la polémique, le porte-parole des évêques a déclaré que l'Eglise polonaise pratiquait une politique de « tolérance zéro » vis-à-vis des abus sexuels et Mgr Michalik a dû présenter ses excuses pour tous les « prêtres qui ont fait du mal aux enfants ». Récemment, Mgr Michalik avait estimé que la pédophilie prenait racine dans la pornographie et le divorce, deux « blessures douloureuses et durables », selon lui. Ces événements surviennent dans un climat particulier, alors que l'Eglise en Pologne est accusée, comme dans d'autres pays tels que l'Australie et le Canada, d'avoir délibérément couvert les agissements de prêtres pédophiles. Et ce dans un pays où 90% des 38 millions d'habitants se reconnaissent comme catholiques, et où la population est très attachée à la figure de Jean-Paul II, « son pape ».

Pédophilie, pornographie et divorce

Pourtant, ce dernier est régulièrement critiqué pour sa réticence à recueillir les accusations de pédophilie envers des prêtres. Ce n'est que vers la fin de son pontificat, et surtout sous la pression de son successeur Benoît XVI, que l'Eglise s'était décidée à réagir, aidée en cela par les scandales de pédophilie à répétition qui avaient commencé à émerger aux Etats-Unis à partir de 2002. En 2011, Joseph Ratzinger avait donné des instructions à l'ensemble des conférences épiscopales dans le monde pour qu'elles écartent systématiquement de la prêtrise les curés concernés. L'Eglise polonaise a elle aussi émis des guides à destination des paroisses sur les sanctions contre les prêtres et le soutien moral aux victimes. Mais elle a exclu de donner de sa poche des compensations financières, ce qu'a fait l'Eglise au Canada et aux Etats-Unis par exemple, et a estimé que seuls les prêtres reconnus coupables d'abus sexuels devaient payer des amendes. Une position qu'elle ne pourra peut-être pas soutenir longtemps car elle devra prochainement subir son premier procès intenté directement par une victime de prêtre pédophile.

Le débat a d'abord démarré le mois dernier à des milliers de kilomètres de là, en République Dominicaine, après qu'ont été révélés les agissements d'un prêtre polonais dans cette île des Caraïbes. Wojciech Gil, curé d'une toute petite paroisse rurale isolée, a accusé la mafia locale de lui avoir fait payer son travail d'éducation de la jeunesse locale. Soupçonné de l'avoir protégé, l'archevêque Jozef Wesolowski, le nonce apostolique, c'est-à-dire l'ambassadeur du Vatican, a été aussitôt limogé. Depuis 2001 et le début de l'offensive de l'Eglise contre les prêtres pédophiles en son sein, 27 curés polonais ont été traduits devant la justice, mais tous ont écopé de peines de prison avec sursis.

 

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