Le test de virginité, un passeport pour le lycée

La proposition d'imposer un test de virginité à l'entrée du lycée fait bondir l'éditorialiste du Kedaulatan Rakyat. A ses yeux, elle illustre une subsistance du patriarcat dans la société.

L'annonce par le département d'éducation de la municipalité de Prabumulih [130 000 habitants], Sumatra sud, d'instaurer un test de virginité pour les lycéennes de la ville a aussitôt retenti comme un écho d'un autre âge aux oreilles de toutes les femmes. Le contraire aurait été étonnant. Sous prétexte de préserver les jeunes d'actes négatifs, il faudrait que chaque adolescente qui veut entrer au lycée passe un test de virginité !

Cette idée est non seulement insensée mais en plus discriminatoire. Elle est non seulement contre-productive mais humiliante pour les femmes. Le plus tragique, c'est qu'elle semble obtenir le soutien de certains politiciens et du Conseil des oulémas indonésiens de Java. Ce dernier en rajoute en proposant que ce test de virginité soit inscrit dans la Constitution.

Heureusement, le ministre de l'Education et de la Culture a rapidement réagi avec cette phrase plutôt rassurante : "Et alors, si elles ne sont plus vierges, qu'allez-vous faire ? Leur interdire d'aller à l'école ?" Il a ajouté que si les fonctionnaires du département d'éducation de Prabumulih s'obstinaient à vouloir faire passer cette loi, il les convoquerait à Jakarta.

La prolifération des vidéos pornographiques

Le ministre a rappelé que le gouvernement central dispose de l'autorité pour intervenir dans les réglementations des gouvernements régionaux : "Les départements et les villes jouissent certes d'une certaine autonomie, mais ils ne peuvent pas, comme bon leur semble, franchir certaines limites qui violent les principes fondamentaux de la nation."

En fait, la municipalité de Prabumulih n'est pas la première à avoir ce projet de test de virginité. Au cours d'une conférence de presse organisée pour s'opposer à ce projet, l'institut des femmes [Institut Perempuan] a rappelé qu'à l'an 2000 les membres du parlement régional de Jambi [Sumatra] avaient proposé d'instaurer un test de virginité pour les lycéennes et les étudiantes. En 2007, le maire d'Indramayu avait lancé la même idée en avançant la prolifération des vidéos pornographiques.

Dans les deux cas, cette proposition avait soulevé un tollé de protestations. Les législateurs de Prabumulih peuvent-ils nous expliquer pourquoi seule la moralité de la femme est mise en cause ? Alors que si on l'accuse de relations libres, il est impossible qu'elle ait agi seule ! Et si on associe la non-virginité avec la rupture de l'hymen, il se peut très bien qu'elle soit causée en faisant du sport, par un accident ou encore par un viol dont l'auteur est bien évidemment un homme, que ce soit le petit ami, le voisin, un parent proche, voire un professeur.

Le sceau de la discrimination et de la violence

Cette annonce arrive comme une nouvelle gifle infligée aux jeunes filles qui se verraient soudain privées des droits que leur accorde l'article 28 C de la Constitution de 1945 : "Chaque personne jouit du droit de se développer conformément à ses besoins essentiels, du droit d'étudier et de bénéficier des bienfaits des sciences et des technologies, des arts et de la culture pour améliorer la qualité de sa vie et pour le bien-être de toute la communauté humaine."

Ce test de virginité souligne à quel point notre société est encore gouvernée par une pensée patriarcale. "Associer la non-virginité à la morale de femmes dépravées" est une preuve de plus que les valeurs de notre monde sont toujours définies du point de vue des hommes, alors que les rapports de nombreuses ONG montrent que les violences sur les enfants et les femmes sont en croissance continue, plus particulièrement les violences sexuelles sur les jeunes filles.

L'ironie, c'est que le propre de l'éducation est de former le caractère de l'enfant et non pas de détruire son avenir en l'humiliant par des mesures discriminatoires. L'éducation transmet les valeurs d'égalité des sexes et de la non-violence. Alors on se demande vraiment quel sens a ce test de virginité marqué du sceau de la discrimination et de la violence, précisément, pour pouvoir entrer au lycée ?

Ces jeunes filles qui ne sont plus vierges n'auraient donc plus accès à l'éducation ? Ce n'est pas par un test de virginité qu'on va régler le problème des adolescents dévergondés. L'éducation doit faire comprendre aux jeunes comment fonctionne la sexualité afin que garçons et filles apprennent, dès la préadolescence, à respecter leur corps et celui de l'autre. C'est par ce respect mutuel qu'ils sauront s'apprécier, sans discrimination ni humiliation.

 

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